CUBANET

12 décembre, 2001



Les villages captifs (III et Fin)


Héctor Maseda, Grupo Decoro

LA HAVANE, décembre (www.cubanet.org) – L’exil, bien qu’il se produise avec une apparence dorée, n’est jamais exempt de son caractère abusif et cruel. Mais quand il s’étend d’une façon indéfinie à des dizaines de milliers de personnes innocentes de la même nationalité que les gouvernants leur imposent, il acquiert alors une connotation de crime de lèse citoyens.

Fredesvinda Hernández Méndez (Fredes) fait un effort pour se souvenir si avec le temps se sont améliorées les conditions de vie des résidents des villages captifs.

"Il est vrai – dit-elle – qu’à partir de 1978 l’Etat cubain les a amélioré un peu. Les rues principales ont été asphaltées et ils ont pavé les trottoirs. Les voies d’accès entre les bâtiments, anciennement en terre, ont été substituées par du carrelage de ciment préfabriqué. Ils ont mis à notre disposition quelques zones vertes et deux ou trois magasins de comestibles et de vêtements. Ils ont agrandi le poste médical et ses spécialités, en le convertissant en polyclinique. Ils ont inauguré une petite salle de vidéo et une aire commune pour que la population y puisse faire des fêtes. Ils ont arrangé la distribution d’eau potable pendant deux ou trois heures par jour. En plus, ils ont construit un demi-pensionat primaire, une secondaire de base et une garderie d’enfants. Toutes ces oeuvres ont été faites par les membres de nos familles prisonniers, obligés à travailler comme des esclaves".

"Malgré cela - signale Fredes – nous n’avons pas de bibliothèque, ni de théâtre, ni de centre culturel, ni de musée, ni de salle d’expositions, ni d’école de formation d’ouvriers qualifiés ou de techniciens moyens. Le transport est presque nul, nous disposons seulement de camions qui couvrent la ligne San Cristóbal-López Peña, toutes les heures, jusqu’à quatre heures de l’après-midi. Jusqu’à présent nous n’avons pas de communications. Il y a aussi un petit autobus, de vingt places, qui fait deux voyages par jour jusqu’à La Havane, mais qui généralement est hors de service. C’est tout ce que possède une population de dix mille habitants et plus".

La dame continue en disant : "Evidemment, nous avons un terre-plein comme seule entrée et sortie du village et que le gouvernement n’a pas voulu asphalter. Il s’étend sur deux ou trois kilomètres jusqu’à l’autoroute La Havane-Pinar del Río. Pendant l’époque des pluies il se convertit en rivière. Le reste de l’année, la poussière et la saleté ne nous laissent pas vivre. Nous sommes entourés de bois et de savanes de tous les côtés, et le village le plus proche (San Cristóbal) se trouve à environ 15 kilomètres".

Un autre aspect de la vie des exilés est la surveillance permanente. Les visites de la police politique (DSE ou G-2) sont périodiques et les convocations dans leurs locaux sont constantes. "Nous sommes surveillés 24 heures par jour par le DSE. Ils nous voient toutes les semaines ou nous convoquent à San Cristóbal, où se trouve le siège de l’organe policier. Nous ne pouvons pas nous faire de relations ni nous réunir avec d’autres voisins sans courir le risque d’être accusés de conspiration, par ce corps répressif. Dans chaque immeuble il y a trois ou quatre familles d’indicateurs. Les officiers du DSE et les indicateurs se réunissent toutes les semaines dans des locaux de la secondaire de base pour échanger des renseignements et donner de nouvelles instructions. Comme l’on comprendra, nous n’avons pas une vie normale, ni sociale ni individuellement".

Las vicissitudes des exilés non seulement sont présentes dans l’observation, le contrôle et les menaces de la police, mais aussi se manifestent dans les aspects économique, du travail et politique.

Fredes affirme: "Et comme si cela était peu, nous sommes soumis à une discrimination systématique au travail et économique. Le manque de confiance politique qu’exerce sur nous l’Etat totalitaire nous limite l’accès à du travail de plus grande responsabilité et à une meilleure rémunération. Ils ne sont pas intéressés par la préparation professionnelle. Ce procédé officiel s’étend avec un acharnement égal à nos enfants et nos petits-enfants. Ils n’approuvent pas non plus les demandes que nous faisons au Pouvoir Populaire (gouvernement municipal) pour qu’ils nous permettent de travailler pour notre propre compte comme le prévoit la loi et, de cette manière, obtenir quelques centimes en plus pour le bénéfice de la famille. Ainsi, les autorités nous punissent non seulement à l’exil mais aussi à l’indigence".

Un autre des thèmes auquel se rapporte Fredes c’est l’effort du gouvernement pour ajouter les habitants des villages captifs au troupeau d’agneaux. "Ils essaient d’obliger les familles à participer aux manifestations de soutien au régime. La majorité d’entre nous refusons. Quelques descendants des exilés se sont intégrés au processus politique imposé par Castro de bonne foi ou par opportunisme, mais en général ils ne se soumettent pas à la tromperie. Ils savent que dans leur patrie ils n’ont pas d’avenir. Leurs parents et grands-parents sont de magnifiques exemples de cela. Pour cela beaucoup d’entre eux demandent à la SINA (Section d’Intérêts de Amérique du Nord à Cuba) l’asile politique pour s’en aller vers les Etats-Unis. Ceux qui ne sont pas acceptés par le Département de Réfugiés et travaillent dans n’importe quelle dépendance d’état, les organisations politiques et de masse du centre leur préparent des actes de rejet, et on les expulse de leur emploi. Aucune des familles exilées n’a la permission de déménager vers les provinces de Villa Clara, Sancti Spíritus ou Cienfuegos, proches de l’Escambray".

Il est notoire que depuis les années 1960-65, époque où ont proliféré les mouvements insurgent armés contre le gouvernement de Fidel Castro dans les différentes zones montagneuses du pays, le DSE a infiltré des agents à l’intérieur de ces groupes pour les neutraliser d’une façon ou d’une autre.

Fredes ne perd pas l’occasion d’exposer ses expériences, après avoir coexister obligatoirement quelques années avec ces individus.

"De nombreux agents du gouvernement infiltrés dans les guérillas – signale la dame – ont été capturés, jugés et condamnés apparemment par des tribunaux militaires dans de sommaires jugements, pour ensuite, et avec un fort aval, les envoyer aux Etats Unis en qualité de réfugiés politiques. Parmi les collaborateurs et les ex soulevés survivants, quelques-uns uns furent exilés vers les villages captifs, et se sont maintenus comme tels depuis lors. Nous savons que préparer un bon agent d’intelligence demande des années de travail et de grands sacrifices. Castro les prépare bien, mais aussi commet de graves erreurs. Moi j’ai été témoin du toupet avec lequel ces individus ont procédé une fois l’asile politique obtenu du gouvernement des Etats-Unis. Ces messieurs ont osé célébrer des soirées d’adieux la veille de leur départ, avec plusieurs officiers du DSE que nous connaissons bien, puisque ce sont les même qui nous harcèlent quotidiennement. Leur mission, nous avons des doutes de leur succès, est celle de faire des travaux d’intelligence à faveur du castrisme dans ce pays voisin".

Les résidents des quatre villages captifs vivent dans les mêmes conditions, dans un degré plus ou moins grand que celles décrites par Fredes.

"Aucun des résidents des villages captifs qui vivent dans la situation décrite auparavant, ne pouvons pas nous sentir heureux dans ces endroits. Ici on nous soumet quotidiennement aux tortures psychophysiques les plus raffinées qui puisse sortir d’esprits déséquilibrés. Nous n’avons pas de vie tranquille et stable, parce que les autorités cubaines l’ont décidé ainsi depuis de nombreuses années. Ce même cadre peut être observé parmi les habitants des autres villages captifs. Nous le savons parce que nous maintenons certains liens avec eux et nous sommes en relation avec eux hors de ces camps de concentration et d’exil, nous inter changeons des informations et nous nous racontons fréquemment nos expériences les plus désagréables dans ces sombres parages dans lesquels nous sommes obligés à vivre et mourir".

Fredes conclut : "Ici il n’y a ni grillages ni soldats armés pour limiter nos mouvements, mais nous sommes enfermés dans une prison différente, ultramoderne, dans laquelle la discipline pénitentiaire, les clôtures et les gardes sont programmés dans nos esprits. C’est comme s’ils avaient placé des anneaux magnétiques aux cous des condamnés et ceux-ci étaient serrés à mesure que nous nous éloignons du village. Pression qui peut en arriver jusqu’à l’asphyxie".

Ce qui est vrai c’est que les victimes de cet ostracisme doivent se sentir comme des petits animaux de laboratoire, à qui des scientifiques sans scrupules soumettent à des épreuves les plus dissemblables pour vérifier jusqu’où est capable l’être humain de résister à l’extrême cruauté de ses gouvernants.

Les villages captifs (II) / Héctor Maseda / Grupo Decoro

Les villages captifs (I) / Hector Maseda / Grupo Decoro

Traduction: Genevieve Tejera

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