CUBANET

27 Mai, 1999


Cuba: le lupanar continue au-delà des lois et des consignes

par Jésus Zuñiga, Coopérative de Journalistes Indépendants

LA HAVANE, mai – Belkis a 16 ans et est la fille de parents divorcés. Elle habite avec sa mère qui est professeur d'un pré-universitaire avec un salaire mensuel de 271 pesos, supérieur à la moyenne de Cuba. Elle n'a pas, comme quelques-unes unes de ses amies, de famille à Miami qui lui envoie des dollars, mais la nature lui a fait don d'une beauté divine, qui dans la fleur de l'adolescence la rend coquette. Elle veut s'habiller à la mode, aller dans de bonnes discothèques et profiter de ce qui est là, à la portée de ses yeux, mais très loin de ses mains.

Apres avoir beaucoup pensé, en vacillant entre les conseils de sa mère et les expériences de ses camarades d'école, elle décida de tenter son sort. Le jardin voisin des hôtels Habana Riviera et Melia Cohiba fut le premier lieu de rencontre avec un touriste espagnol qui ensuite la fit monter à sa chambre et la paya 50 dollars pour cinq heures de service. Malgré cela, selon sa propre confession, ce furent les heures les plus malheureuses de sa vie. Le client avait l'âge de son grand-père.

Avec l'argent elle s'acheta une paire de chaussures de tennis qui lui plaisait tant et quelques kilos de viande pour sa famille. « Ce qui est le plus difficile maintenant », explique-t-elle, «c'est de justifier tout cela à ma mère. Elle sait que j'avais eu des relations avec un petit ami, mais pour de l'argent avec un étranger, c'est quelque chose de honteux ».

Belkis croit qu'un grand pourcentage de jeune cubaines prennent quotidiennement une décision similaire. « C'est une façon rapide de solutionner les problèmes. Je ne sais pas si après je vais le faire de nouveau. Je crois que si j'en avais besoin de nouveau, je serais disposée à recommencer le même coup».

Belkis est ce que l'on connaît sous le nom de pseudo-jinetera ou jinetera à moitié. Ce secteur ne se consacre pas à temps complet à cette fonction, mais est formé d'une population flottante de «lutteuses » qui descendent dans la rue de temps en temps quand la situation chez elle devient plus accablante. D'autres, qui déjà se sont mariées, arrivent à se mettre d'accord avec leurs maris et se rendent aux bastions hôteliers pour chercher des dollars. Ensuite elles apportent l'argent chez elles et tout reste entre mari et femme. Les maris, loin de se sentir blessés, font contre mauvaise fortune bon cœur en se résignant à l'idée que dans la vie tout est possible.

« Pour elle, le sexe avec des touristes est seulement comme une représentation théâtrale. L'amour elle le fait avec moi », dit Daniel, employé gastronomique de 32 ans, en se référant à sa femme.

Le personnel médical de la polyclinique du secteur Reina a fait une investigation sur une épidémie de blennorragie (gonorrhée) qui s'est déclarée dans la zone du Centre de La Havane. Une chaîne dont l'anneau a déjà été découvert : une mineure de 12 ans est arrivée dans un état critique à la polyclinique en se plaignant de la même maladie que les toubibs avaient suivie. La police intervint dans l'affaire et commença à enquêter dans les recoins les plus retirés du voisinage. La petite fille depuis un bon moment travaillait dans le commerce obscur de la prostitution sans avoir perdu sa virginité. Le procédé qu'elle employait avec la clientèle dénonçait sans détour l'origine du surnom par lequel elle était connue dans le quartier : La Vampire.

Selon les évidences, la famille, d'un niveau économique très bas savait ce que faisait la petite fille. Sa mère confessa finalement que c'était le seul moyen qu'elle avait trouvé pour obtenir plus d'argent à la maison. La mineure suçait le pénis du premier homme qui payait, mais ne s'était jamais laissée posséder. La mère, irresponsable, se trouve maintenant à la disposition des tribunaux.

La nature de ce cas, catalogué par les spécialistes comme proxénétisme maternel, a produit la stupeur dans l'opinion publique, particulièrement parmi les voisins de l'endroit. Le fait que des histoires de ce genre soient seulement le sujet de conversation de quelques quartiers de la capitale et qu'elles soient maintenues sous le voile du silence d'état, empêche de mesurer dans sa dimension totale la corruption généralisée, particulièrement sexuelle, de la plus grande ville de l'île.

Les oreilles des gens de La Havane se remplissent quotidiennement d'histoires qui décrivent les façons les plus développées et d'avant garde de gagner sa vie dans la jungle de l'asphalte de La Havane.

Pendant que quelques revues qui circulent à travers l'Europe montrent des photos de femmes à demi nues et provoquantes invitant à rendre visite à l'île, à partir du décret-loi 87 on a créé des commissions destinées au travail des enfants. Ces groupes, composés par des membres du Parti Communiste et du Ministère de l'intérieur cubain, abordent les mineurs qui mendient dans la rue ou montrent leurs bénédictions corporelles aux étrangers. La première étape est d'effectuer un recensement de la quantité qu'il y a dans chaque municipalité et ensuite aller dans les maisons et avertir les familles sur la possibilité qu'elles ont d'être sanctionnées par la loi.

En accord avec les résultats qu'ont donné ces commissions, la plus grande partie des familles visitées perçoivent de bas revenus et ne peuvent pas garantir certaines nécessités aux mineurs, comme vêtements, chaussures, et dans bien des cas un plat de nourriture. De toutes façons le problème va au-delà et arrive même dans les meilleures familles.

D'un côté du Capitole National fonctionne La Marquesina, un club où l'on peut trouver des jeunes filles de 14 à 15 ans dont les tarifs n'excèdent pas trois dollars ou leur équivalent en pesos cubain. A un kilomètre alentour, la corruption sexuelle est concentrée, se manifestant désinvolte devant les yeux des passants et des voisins.

Les petits hôtels les plus proches travaillent en coordination avec ce qu'on appelle les «travailleuses pour leur propre compte du département des soins à l'homme ». Une chanson de l'exilé cubain Willie Chirino, fredonnée par la jeunesse cubaine dans les années 90, illustre ce qui se passe dans les rues de La Havane en cette fin de siècle : « Les policiers essaient, les jineteras passent ».

Même si les autorités ont enregistré des lois qui répriment la prostitution et la dépravation sexuelle, une nouvelle quantité d'agents de l'ordre publique détachés dans ces zones franches de la capitale font semblant de ne pas voir les vendeuses du plaisir furtif.

En se promenant dans l'Avenue du Port on trouve des «guides touristiques » partout qui montrent le centre historique de la capitale, en les séduisant avec la grâce créole.

Une femme d'environ 30 ans est assise sur le mur du Malecon avec son jeune fils handicapé quand un policier lui ordonne de s'en aller, en l'accusant d'utiliser l'enfant pour mendier. La jeune personne s'en va en protestant. Moins d'un quart d'heure plus tard elle revient au Malecon vêtue d'un bermuda en lycra bien serré au corps, qui laisse entrevoir ses parties génitales. Elle a une paire de sandales à plate-forme aux pieds, une fine chaîne à la cheville et une chemisette légère de marque.

Le gendarme, quand il la rencontre de nouveau, lui sourit malicieusement et s'en va plus loin sur le Malecon.

Quatre-vingt-dix jours après le début de la nouvelle croisade contre la prostitution dans l'île, sous le masque légal du décret-loi 87, La Havane est toujours corrompue et dépravée. Et rien ne changera pendant qu'existera le régime totalitaire actuel, l'unique auteur et responsable de la catastrophe économique, politique et sociale que traverse la société cubaine.


Traduction: Genevieve Tejera

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