Portrait parlé de la prison
Valle Grande
(Interview de Pedro Pablo Alvarez Ramos, un leader syndical qui a été
plus de trois mois prisonnier pour des «causes qui n'existent plus »)
LA HAVANE, le 31 janvier (Carmelo Diaz Fernandez, APSIC) La prison
Valle Grande, située dans la municipalité havanaise de La Lisa, se
compose de six baraques et cinq bâtiments (deux d'entre eux de trois étages
et les autres de deux). Là sont restés, et sont toujours enfermés
des prisonniers politiques cubains. L'un d'eux Pedro Pablo Alvarez Ramos, a été
libéré après plus de trois mois d'incarcération sans
qu'il ait commis de délit et sans qu'on l'ait jugé. Alvarez Ramos
nous parle de ce pénitencier.
«Valle Grande est une prison de transit, soit de prisonniers qui
attendent un jugement. Je ne crois pas que ce soit celle aux plus mauvaises
conditions. Je pense qu'il y en a qui sont pire, selon le témoignage de
prisonniers avec lesquels j'ai parlé », explique l'interviewé.
Pedro Pablo Alvarez Ramos est le secrétaire général du
Conseil Unitaire de Travailleurs de Cuba (CUTC). Il a été arrêté
par des officiers de la police politique le 14 octobre de l'année dernière.
Il n'a commis aucun délit. Il a seulement convoqué à une réunion
nationale les membres de l'organisation syndicale dont il est le leader.
Le département de la Sûreté de l'Etat l'a accusé
de « résistance à la détention », mais Alvarez
Ramos est un défenseur des droits de l'homme qui utilise des méthodes
non violentes. Dans de telles circonstances le syndicaliste indépendant a
été enfermé à Valle Grande.
« Il y a des déficiences de tous genres dans cette prison. Par
exemple, la nourriture est très mauvaise, très très
mauvaise. Au prisonnier on doit donner tout ce qui est nécessaire pour
son séjour dans le pénitencier, depuis un drap jusqu'à une
couverture, là il n'y a rien de cela, le prisonnier de Valle Grande doit
payer son séjour dans cet endroit », précise Alvarez Ramos.
Le leader de la CUTC indique qu'il était enfermé dans la
Compagnie 9 et que dans ce local (de 25 mètres de long par six de large
environ) les prisonniers sont entassés. « Il y a deux files de vingt
couchettes triples, ce qui signifie qu'il y a des lits pour 120 personnes et
nous étions 180 environ. Il y a 60 prisonniers qui dorment sur le sol et
il y eut des moments où il y en avait un plus grand nombre », a-t-il
précisé.
Alvarez Ramos révèle que les rats, les cafards et les mouches
pullulaient dans le pénitencier, d'où l'on déduit qu'ils y
a de sévères problèmes de salubrité dans cette
installation appartenant à la Direction Nationale de Pénitenciers
et Prisons du Ministère de l'Intérieur.
Mais la direction même de Valle Grande conspire contre les normes élémentaires
d'hygiène. « L'eau ils la fournissent une fois par jour pendant à
peine une demi-heure », explique le syndicaliste.
Au sujet des soins médicaux, Pedro Pablo Alvarez Ramos dit que le
pire est le manque de médicaments et le très mauvais service de
stomatologie. « Il y a un seul dentiste pour tout Valle Grande, dont la
population pénale est de presque 3 mille prisonniers, mais il y a des
gens là qui depuis des mois et des mois attendent qu'on leur arrache ou
leur plombe une dent, il y a un manque de calmants et d'antibiotiques. »
Alvarez Ramos se réfère au TOS (Travail Opératoire
Secret), une section du Ministère de l'Intérieur qui recrute les
prisonniers pour les utiliser comme délateurs et contre les prisonniers
politiques. «En réalité il existe explique-t-il
et utilise de nombreux reclus communs, ce sont ceux de l'intelligence à
l'intérieur des prisons. Même il y a une vigilance très
forte de la correspondance non seulement des prisonniers politiques, mais de
tous en général. Ils ouvrent et lisent toutes les lettres qui
entrent et sortent du pénitencier ».
« Nous, nous savions que le TOS avait des prisonniers de Valle Grande
qui travaillaient pour eux, des gens qui se prêtent à ces choses »,
a souligné Alvarez Ramos.
Le leader syndical clarifie que lorsqu'ils sont venus le libérer les
officiers de la Sûreté de l'Etat lui ont expliqué qu'il y
avait « un changement de mesure » qui consistait en « liberté
immédiate ».
C'est un subterfuge qu'ils utilisent beaucoup et qu'ils vont peut-être
utiliser avec d'autres prisonniers politiques qui sont maintenant à Valle
Grande, parce qu'ils n'ont pas les éléments pour les faire juger »,
dit-il.
« L'officier Boris et le colonel Atencio m'ont dit que les causes
avaient disparu qui avaient à un moment existé pour m'incarcérer,
qu'il y avait un peu plus de calme. Malgré cela, hier nous avons vu
comment on a essayé de faire une réunion chez Hector Palacios et
la répression continue, la nervosité continue de leur côté,
ce qui veut dire que cet état n'a pas passé, comme ils m'ont dit »,
pense Alvarez Ramos.
Le syndicaliste considère que sa libération se doit à
la solidarité internationale qu'il a reçu de la part de syndicats
et de personnes extérieurs au pays.
Pedro Pablo Alvarez se réfère à la confiscation de
5,040 dollars et 80 pesos lorsqu'il a été arrêté en
octobre 2000. « Cet argent était principalement pour payer les
voyages et les démarches, établis par la loi d'émigration
cubaine, de quelques membres du CUTC, parmi lesquels je figure, qui étaient
invités à différentes rencontres internationales ».
« L'argent a été envoyé par la CLAT pour nous
aider avec ces démarches légales. La Centrale Latino-Américaine
de Travailleurs a déjà réclamé cet argent et,
maintenant, nous allons faire la réclamation légale parce c'est de
l'argent qui est entré légalement dans le pays », a conclu
Alvarez Ramos.
Traduction: Genevieve Tejera
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