SOCIETE
Le cyclone et mon quartier
Oscar Mario González, Grupo Decoro
LA HAVANE, août (www.cubanet.org) - Définitivement,
l'ouragan Charley, qui a soufflé sur notre capitale
vers minuit le 13 août, s'en est pris à mon quartier.
Ce ne pouvait pas être d'une autre manière, parce
que le quartier Almendares est situé près de
la trajectoire qu'a suivie le phénomène atmosphérique.
Dans la zone qui m'entoure on peut distinguer deux zones
géographiques et socioéconomiques bien définies
: celle des riches et celle des pauvres.
En parlant de riches c'est une dénomination interdite
dans le lexique créole, interdiction qui date de 1959,
quand la révolution a proclamé que tous, absolument
tous nous étions égaux, camarades et révolutionnaires
; non par un droit naturel illusoire et bourgeois, mais par
oeuvre, volonté et grâce du petit père
de la patrie.
Malgré cela, dans cette zone, depuis l'Avenue 19 et
en descendant vers le littoral, habitent, rêvent et
jouissent les puissants, représentés par les
grands pontes du gouvernement et le personnel de sociétés
et d'ambassades étrangères. Dans toute cette
portion de territoire el cyclone a fait récolte en
faisant tomber des arbres et des poteaux électriques.
Le coup de fouet du cyclone en est arrivé à
un tel point qu'encore aujourd'hui, à peu de tours
du passage de l'ouragan, il est impossible de se déplacer
en automobile jusqu'à la première avenue du
quartier de Miramar, à moins que le véhicule
ne fasse des zigzags. En réalité, je n'avais
jamais senti ce sentiment ineffable de tristesse face à
l'arbre centenaire prodigieux avec ses racines regardant vers
le ciel comme un cadavre avec la bouche ouverte.
De l'Avenue 19 vers le haut et en montant vers la large Avenue
31, se trouve le quartier de Buena Vista, où se concentrent,
bien serrés, hommes, femmes et enfants dans des chambres
de couloirs et pièces de terrains vagues ; maisons
octogénaires de ciment et de bois, trottoirs étroits,
tables de dominos que saluent les petits matins entre gorgées
de petites gouttes et train, bruit et brouhaha.
Là Charley a pris plaisir à défaire
le papier des plafonds, en levant les toits et quelquefois
en démolissant les structures. Avec moins d'arbres
mais beaucoup de misère, le quartier de Buena Vista
a fait face au cyclone dans une lutte de lion à singe,
où à la fin de nombreuses personnes on perdu
l'armoire, le lit, la cuvette ou la paire de tongs. Tout d'une
grande valeur, parce que quand on manque des choses élémentaires
n'importe quel truc a du prix.
Comme j'habite entre du jardins publics équidistants
j'ai du m'asseoir pour pleurer avec eux. Ils gémissaient
pour les chagrins du quartier et moi attristé pour
la douleur de mes deux jardins amis.
L'un d'eux est le Jardin Japonais, entre les avenues 15 et
17 et les rues 46 et 48, dans lequel sont seulement restés
debout les arbres ayant plus de cinquante ans. Les autres
se sont effondrés sur les allées cimentées,
cachant les vieux bancs ou ce qui restait d'eux.
Mais le kapokier a été protégé
par le pouvoir des dieux Yorubas, exactement comme autrefois
il a été garni au moment du cyclone de 44, comme
m'a dit un vieil homme de l'endroit. Une profonde consternation
avait été causée parmi tous avec la fausse
nouvelle qu'il était tombé. Malheureux celui
qui joue avec les choses sacrées !
L'autre jardin qui a toujours été connu comme
Source Lumineuse et qu le gouvernement a baptisé Martyrs
Africains, en le remplissant de statues. Il se trouve entre
les avenues 13 et 11 et les rues 62 et 64. Là se trouvent
plus de 10 statues de leaders africains d'orientation marxiste
et ex amis du régime cubain. Parmi eux Patrice Lumumba,
Amílcar Cabral et Sekou Touré. Le peuple connaît
cet endroit comme le Jardin des Africains.
Dans celui-ci n'est resté vivant aucun des nombreux
lauriers qui le décoraient, et plus qu'un jardin il
s'est converti en un cimetière botanique, sous le feuillage
mort duquel gisent ceux qui un jour ont accompagné
le régime cubain dans ses épidémies totalitaires
et anti USA.
Mon quartier est triste, a faim, est écorché
et dépeigné. De nombreux voisins n'ont pas encore
de lumière, d'eau et de combustible. Laid, triste et
inconsolable se trouve mon quartier. Même ainsi, moi
je l'aime.
Traduction: Genevieve Tejera
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