De
la prison : Brève description
Manuel Vázquez Portal, condamné à
18 ans de prison
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PRISON DE BONIATO, Santiago de Cuba, juin (www.cubanet.org)
- La cellule (No. 31) a un espace d'environ un mètre
et demie de large sur 3 mètres de long. Porte de barreaux
semi murée avec une planche d'acier. Une fenêtre
de barreaux qui s'ouvre sur la partie l'est du bâtiment.
Entrent par elle le soleil, la pluie et les insectes. Une
couchette faire avec barres de métal entrelacées,
une planche bois pressé et un matelas de ouate dure,
sale et vieille. Le WC est une tasse à la turque, sans
siphon qui régurgite la mauvaise odeur pendant 24 heures.
A cet endroit, sur la partie supérieure, un robinet
d'eau pour se laver et boire. Pas de table, ni de chaise,
pas d'étagère pour les objets personnels. Pas
de drap, ni d'oreiller, ni de moustiquaire, pas de couverture.
Pas de radio, ni de télévision, pas de journaux
ni de livres. Pas de couverts, ni de verre ou de broc. Tout
en plastique et apporté par la famille. Pas de serviette
de toilette. Ils violent l'intimité de la correspondance.
La cellule s'inonde tous les tours avec les eaux résiduelles
du couloir. Le plafond défoncé a des filtrations
et quand il pleut il tombe des gouttes abondamment. Le bâtiment
est entouré d'un mur d'entre 8 et 9 mètres de
haut. Cette partie du pénitencier on l'appelle "Boniatico";
c'est la section consacrée à la plus grande
sévérité. Ici se trouvent les condamnés
à la prison à perpétuité et à
la peine capitale, il y a aussi quelques "sideux".
Comme le bâtiment a plus de 60 ans les animaux nuisibles
abondent, tout un zoo : des rats, des cafards, scorpions,
fourmis de tout genre, mouches, moustiques.
Ils nous sortent séparément dans la tour une
heure par jour. Ils nous enlèvent les menottes dans
la cour et nous les remettent pour rentrer à la cellule.
Egalement pour recevoir les médicaments ils nous emmènent
avec les menottes. Le samedi et le dimanche ils n'offrent
pas la cour. Nous passons presque 60 heures sans sortir des
cellules.
Les repas sont presque indescriptibles. Un effort de l'imagination
et de l'investigation : Petit déjeuner : pain (je n'ai
pas pu deviner avec quoi ils le font) et boisson épaisse,
un apport linguistique et culinaire. C'est de la farine de
mais grillée et ensuite cuite avec beaucoup d'eau et
de sucre. Je ne mange aucune des deux choses. Déjeuners
: soupe (eau, farine de blé et une herbe méconnaissable).
Riz ou farine de mais ou coquillettes, dans chaque cas sans
graisse ni autre nourriture. Ceux-ci sont alterné les
tours de la semaine quelques fois avec un hachis de soja peu
de fois - ou "sexe de vache" (les prisonniers l'appellent
d'une façon plus grossière), qui consiste en
ne pâte blanche - une sorte de colle - faite à
partir de farine de blé et de substances méconnaissables.
Une ou deux fois par mois ils donnent ce qu'on appelle un
repas spécial : un petit morceau de poulet, du riz,
un légume - gros plantain -, et 'zambumbia', bien qu'ils
appellent café. Les dîners : la même chose
mais le soir. Du reste du pénitencier j'ai seulement
pu voir les grillages, les fosses, les guérîtes
des gardiens quand ils m'ont emmené à l'hôpital
pour prendre ma tension artérielle deux fois.
Les gardiens nous traitent avec respect parce que nous faisons
de même avec eux. Seulement Juan Carlos Herrera, celui
de Guantánamo, a reçu des coups forts à
un oeil et je l'ai reconnu par la fenêtre qui donne
sur la cour - solarium - avec le visage enflammé et
violacé.
Fondateur de l'Agence de Presse Decoro,
qui ensuite s'est convertie en Groupe de Travail Decoro en
1999, Manuel Vázquez Portal écrit comme journaliste
indépendant depuis le début du mouvement. CubaNet
a commencé à distribuer ses chroniques - sous
le pseudonyme littéraire de Pablo Cedeño - en
1995, pendant qu'il était en prison. Ses articules
- signés Pablo Cedeño et Manuel Vázquez
Portal - ont commencé à être publiés
sur CubaNet en août 1997, quand il fut libéré.
Son roman El
Niño del Pífano (l'enfant du Pifano) peut
se lire sur ces pages électroniques. La maison d'Editions
CubaNet a publié son recueil de poèmes Celda
Número Cero (la Cellule Numéro Zéro).
Manuel Vázquez Portal a été
arrêté pendant la vague répressive récente
déchaînée par le gouvernement cubain contre
la société civile. Il a été jugé
dans un procès sommaire et condamné, sous la
Loi 88 (Loi Bâillon), à 18 ans de prison.
Traduction: Genevieve Tejera
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